La politique française en Afrique remonte de l’esclavage à la colonisation, puis aux indépendances de façade avec un fil à la patte. Pour la France, il existe trois Afriques : Le Maghreb, l’Afrique noire francophone et les autres. Les autres, vous en conviendrez, sont les Etats anglophones et lusophones. Dans les pays du Maghreb, la France n’a pas imposé sa monnaie de servitude, le franc CFA et son pacte colonial. L’Algérie, le Maroc, la Tunisie et la Mauritanie ont chacun leur monnaie nationale. Les dirigeants ne sont pas imposés par Paris.

En Afrique francophone, la relation de la France avec ses anciennes colonies est beaucoup plus nuancée. Les chefs d’Etats d’Afrique francophone choisis arbitrairement par la France sont de simples exécutants d’une politique néocoloniale qui perpétue les intérêts du maître. Contrairement aux pays du Maghreb, les Etats d’Afrique francophone n’ont toujours pas de monnaie nationale. Ils restent soumis à une monnaie coloniale de servitude qui anéantit tous les efforts et les perspectives de développement.
La politique de la France dans ses anciennes colonies d’Afrique noire est immuable. La perception qu’elle a de ce pré-carré en ce début du vingt et unième siècle n’a pas évolué. L’Afrique francophone reste et demeure une chasse gardée. Jalouse de sa liberté chèrement conquise, la France se conduit en Afrique francophone comme dans une foire. Elle y pratique une politique laudatrice qui maintient indéfiniment au pouvoir, au mépris du droit constitutionnel, des potentats soumis, inféodés, infantilisés et incapables de s’indigner.
La France redoute- t-elle un phénomène de disruption dans ses anciennes colonies ? Dans tous les cas, elle en porte la responsabilité. Cette politique clientéliste est le prolongement de la colonisation qui se poursuit de manière sournoise avec la complicité effective de l’Occident pour une Afrique vassalisée à vie.
La France et les autres Afriques
Il existe une autre France en Afrique. Celle qui crée des partenariats avec les pays du Maghreb, les pays anglophones et lusophones. Dans ces pays, la France investit dans l’industrie lourde pour alimenter le marché français. C’est le cas de l’automobile en Algérie et au Maroc où des contrats juteux mettent en relation des hommes d’affaires locaux et les multinationales françaises.
En Afrique francophone, cette relation d’équité n’existe pas. Dans le pré-carré français, les fonctionnaires corrompus possèdent toute la richesse. Les hommes d’affaires qui se battent pour exister sont très vite anéantis par les multinationales françaises qui ne supportent aucune concurrence en francophonie.
La relation d’affaire entre la France et ses partenaires africains du Maghreb ou non francophones trouve toute sa plénitude dans les projets que poursuit Emmanuel Macron au Nigéria. Pour mener à bien ce projet, Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur et de l’attractivité a rencontré le ministre nigérian des finances, les gouverneurs locaux et des hommes d’affaires.
Alors que les économies des pays francophones d’Afrique sont en déliquescence, la France promeut un partenariat GLOBAL avec le Nigeria. Le président du Nigéria, Muhammadu Buhari est un des invités privilégiés qui font partie de la petite dizaine de chefs d’Etats africains qui participeront au sommet sur le financement des économies africaines qui se tiendra à Paris le 18 mai, à l’initiative d’Emmanuel Macron.
En Afrique francophone subsaharienne, la France n’a jamais financé ou encouragé un projet industriel qui réactiverait les industries moribondes locales. Les ex colonies d’Afrique noire francophone restent des chasses gardées et des réservoirs de matières premières minières et agricoles contrôlées par une monnaie inique : le franc des colonies française (FCFA).
Des projets de grandes envergures auraient pu se réaliser en Afrique noire francophone. Mais la volonté de la France n’est pas de voir ses privilèges tarir. Elle est décidée à maintenir dans la pauvreté et la servitude des « alliés naturels » qui ne sauraient lui échapper. C’est un tort. Un grand tort car l’éveil de la nouvelle jeunesse afro-optimiste, affranchie des pouvoirs et des pressions pourrait balayer cette relation incestueuse, cynique et humiliante.
La relation équilibrée gagnant-gagnant n’a ici aucune place. La France privilégie la relation maître-esclave que nous croyions d’une autre époque. L’indépendance trouve ici ses limites et toutes ses vicissitudes héritées de l’esclavage et de la colonisation.
L’Afrique est un continent d’avenir qui attise de plus en plus de prétendants. La France aurait-elle la sagesse de mettre fin à une politique qui, à long terme, provoquerait un chaos et briserait à jamais l’essence même de la francophonie ? Elle en supporterait la responsabilité car l’heure de l’Afrique conquérante et civilisationnelle a sonné.

Par Michel Lobé Étamé
Journaliste Indépendant

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