(Edito)

Après deux mois de déclarations et de tergiversations intempestives, la posture d’Emmanuel Macron à l’égard des nouvelles autorités du Niger était tout simplement pathétique et intenable :

  • Refus de reconnaître les nouvelles autorités du Niger ;
  • Refus du rapatriement de l’ambassadeur français déclaré persona non grata ;
  • Refus du retrait des 1 500 militaires français basés au Niger, etc…
    Cette posture a choqué la jeunesse africaine qui ne peut comprendre les errements de la France qui reconnait certains putschs et pas les autres.
    Malgré les soutiens de quelques caciques de la CEDEAO, dont le Sénégal, la Côte d’Ivoire et le Bénin, la France a été contrainte d’accepter, malgré elle, les changements en cours dans les pays du Sahel où une jeunesse résiliente combat sans ambages les vestiges d’une politique coloniale aveugle.
    Le Niger était le dernier allié de la France au sahel depuis son départ du Burkina Faso et du Mali où ses troupes n’ont pu éradiquer le terrorisme depuis une vingtaine d’année.
    Les changements en cours et irréversibles en Afrique francophone sonnent le réveil d’une nouvelle Afrique qui veut se prendre en main et décider librement de son avenir. Une Afrique qui veut écrire une nouvelle page de son histoire avec la France et le monde.
    Mais il faut aussi rappeler que les luttes en cours pour mettre fin à une relation incestueuse entre la France et ses anciennes colonies est l’œuvre de nouveaux militants. Ces derniers, dénommés néo-panafricanistes, éveillent les consciences et font adhérer toute la jeunesse à un militantisme dont le but avoué est la souveraineté, la liberté, le développement, le respect des institutions et la justice sociale.
    La décolonisation de l’Afrique francophone aurait pu connaitre un épisode apaisé et équilibré. Mais les appétits insatiables, le mépris, l’arrogance et l’irresponsabilité des multinationales françaises a poussé à l’aveuglement leurs agissements par le clientélisme, la corruption et l’infantilisation des dirigeants africains.
    Pour continuer à peser sur la scène internationale, la France devrait revoir en profondeur sa relation avec l’Afrique francophone où elle traîne un passif douloureux. Elle devrait avoir une relation dépassionnée avec ces pays qui ne peuvent plus supporter une relation post-coloniale très infantilisante.
    En effet, aujourd’hui, l’Afrique francophone, dirigée par des hommes et des femmes très éloignés des préoccupations journalières du peuple, voit sa jeunesse fuir vers des paradigmes imaginaires. Ces dirigeants ne sont pas représentatifs de leurs populations à qui ils ne rendent jamais des comptes.
    Ces jeunes veulent un bol d’air à l’heure où un vent de liberté souffle alors que la mondialisation pointe son nez. Ils sont convaincus que la françafrique est touchée mais qu’elle n’a pas coulé. Elle survit avec le franc CFA qui est un outil d’asservissement et de chantage.
    L’Afrique francophone veut une relation dépassionnée avec la France. Mais celle-ci est incapable de solder ses comptes de colonisation.
    Malgré une balance commerciale qui ne cesse de se rabougrir, le poids des multinationales françaises avec à leurs têtes Total Energy, Bouygues, Bolloré ou Castel ne cessent de cautionner des pouvoirs moribonds. Ces multinationales ne sont pas disposées à renoncer à leurs privilèges exorbitants. Il revient donc à l’homme politique français de mettre un terme à leurs agissements dans les anciennes colonies.
    La France, terre des droits de l’homme devrait aussi renoncer à son acharnement contre les militants africains dont les combats sont légitimes pour libérer un continent qui a tant saigné et qui aspire, comme tous les continents, à se prendre en charge. La vigilance s’impose.
    La françafrique n’est pas morte. Comme un brasier, elle peut à tout moment cracher du feu. Elle a des outils pour y parvenir : le franc CFA et les accords de coopération iniques. Il faut pourtant en débattre pour solder définitivement un passif douloureux. Il faut remuer le couteau dans la plaie sans complaisance.

Michel Lobé Etamé
Journaliste indépendant

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