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Est-ce possible de Construire une nouvelle Afrique sans la France et sans son christianisme, sans sa corruption, sans ses élites médiocres incapables de sortir leurs peuples de la pauvreté ?

Dans son livre « Domination et colonisation » publié en 1910, Jules Harmand, envisage l’évangélisation et le christianisme non pas comme une simple mission spirituelle, mais comme un instrument stratégique de domination culturelle des peuples colonisés. Pour lui, le christianisme doit servir à substituer les croyances, les valeurs et les structures sociales en Afrique et en Asie par celles de l’Europe coloniale.

Au moment où il écrit ce livre, la Chine est toujours colonie française et britannique.

Voici comment il théorise le grand-replacement dans les colonies à travers Jésus et le christianisme :

  1. Le christianisme comme vecteur de civilisation

Harmand considère que les religions traditionnelles africaines sont des obstacles au progrès tel que pensé par le colonisateur français. Il voit le christianisme comme une religion “supérieure”, capable d’éradiquer les superstitions et de structurer moralement les sociétés colonisées.

Il ne s’agit pas de dialogue interreligieux, mais de remplacement pur et simple des croyances locales.

  1. Évangélisation comme outil de discipline sociale

L’évangélisation est conçue comme un moyen de rendre les peuples colonisés plus dociles, en leur inculquant des valeurs comme l’obéissance, la soumission à l’autorité, et la résignation face à la souffrance.

Puisque tout le monde va à l’église, puisque les églises établissent même les actes de naissance, le christianisme devient ainsi un levier de contrôle social, complémentaire à l’administration coloniale.

  1. Éducation chrétienne pour effacer les cultures locales

Harmand insiste sur l’importance des écoles missionnaires, qui doivent enseigner non seulement la foi chrétienne, mais aussi la langue, l’histoire selon la narration validée par l’administration coloniale française et les valeurs européennes.

« Cela permet une désacculturation progressive, surtout chez les jeunes » poursuit Jules Harmand, mais il se garde bien de dire que parmi ces « valeurs européennes », il y a la déportation d’Afrique et la mise en esclavage de millions de noirs, la privation de liberté à la moitié de l’humanité, auquel s’ajoutera l’apartheid en Afrique du Sud et en Rhodésie (Zimbabwe) et la Shoa, le génocide des Juifs.

L’école chrétienne devient en Afrique, un lieu de formatage culturel, où l’on apprend à rejeter les traditions africaines, que la narration ecclésiastique colonialiste dépeint comme nocives, dangereuses, rétrogrades, déviantes etc.

  1. Substitution des rites et des symboles

Jules Harmand écrit que pour gagner la bataille religieuse et imposer le christianisme aux africains les plus récalcitrants, il suggère à l’administration coloniale ni plus ni moins que « l’éradication des pratiques rituelles africaines (cultes ancestraux, divination) au profit des sacrements chrétiens ». Les fêtes religieuses locales doivent être remplacées par le calendrier liturgique européen.

Cette substitution vise à reconfigurer le temps, l’espace et les repères symboliques des sociétés africaines.

  1. Justification pseudo-scientifique

Enfin, Harmand justifie cette évangélisation forcée par une vision évolutionniste : les religions africaines sont “inférieures” et doivent céder devant une foi “universelle” et “rationnelle”. Il ne reconnaît aucune valeur intrinsèque aux spiritualités locales.

QUELLES LECONS POUR L’AFRIQUE ?

Mercredi le 6 novembre 2024 à Paris, le collectif “Tournons la page” et le CERI de Sciences Po organisent une conférence pour rendre public, le résultat d’une enquête menée auprès de 500 militants dans six pays (Niger, Bénin, Gabon, Cameroun, Côte d’Ivoire, Tchad) et qui révèle un rejet « massif, presque unanime » de la politique française en Afrique. Ce rejet est fondé sur des faits, et non sur une simple « émotion » ou une manipulation étrangère russe.

Voici un extrait des résultats l’enquête :


Dispositif sécuritaire non fiable, pillage des ressources, imposition de valeurs occidentales (promotion de la sexualité), collusion avec les élites corrompues, politique du deux poids deux mesures sur les coups d’Etat… Ces enjeux constituent l’essence du rapport « De quoi le rejet de la France en Afrique est-il le nom ? », présenté ce mercredi 6 novembre 2024 à Sciences Po à Paris (France). Ce rapport est une recherche-action menée par Tournons La Page (TLP), en collaboration avec le Centre de recherches internationales de Sciences Po (CERI Sciences Po), dans six pays de l’Afrique francophone (Bénin, Cameroun, Côte d’Ivoire, Gabon, Niger et Tchad).

(…)

« Le principal enseignement de cette enquête est que, dans les réseaux militants, le rejet de la politique française en Afrique est massif, presque unanime », a déclaré Laurent Duarte lors de la présentation dudit rapport organisé en huit chapitres. 67,6% des personnes interrogées pensent que la France est un partenaire non-fiable dans dix domaines clés (santé, éducation, défense des droits humains, renforcement de l’administration, culture, agriculture, défense de la démocratie, sécurité, lutte contre la corruption et économie).

(…)

Rejet du sentiment anti-français

L’usage du terme « sentiment », renvoyant à l’affect en politique, tendrait à faire de la cri­tique de la France une critique irrationnelle. C’est d’ailleurs, à coups de contre-commu­nication, « d’agenda transformationnel » et de « diplomatie publique » que l’État français compte répondre aux critiques virulentes de son action et de sa présence sur le continent africain. C’est pourtant bien les actions de la France qui conduisent à un rejet de sa politique en Afrique : « Pour les gens qui ont compris les relations, ils savent très bien. Ils ne parlent pas de cette relation entre Fran­çais et Africains, mais de cette relation entre l’Afrique et la politique française en Afrique. C’est de ça qu’ils parlent », a précisé Laurent Duarte rapportant les propos d’un membre du focus-group du Niger.

(…)

La France considérée comme un acteur prédateur

C’est dans le domaine économique que la France apparaît comme le partenaire le moins fiable. L’action de ses entreprises est associée au pillage des ressources naturelles, notamment de l’uranium au Niger. « Nous étions à un moment donné le deuxième producteur de certains minéraux. Les plus chers au monde. Et le monopole de cette exploitation appartient à la France. Mais en quoi est-ce que nous, ça nous a développé ? Je ne vois aucun caractère positif », a dit Dan Sanaren, relation les propos d’un membre du focus-group du Niger. L’amertume est d’autant plus forte que, souvent, les entreprises extractives françaises, comme celles des autres pays, ne font pas preuve d’une grande transparence.

Source : https://www.tournonslapage.org/fr/actualites/relations-france-afrique-tournons-la-page-publie-un-nouveau-rapport

Comme on peut bien constater de cette enquête, la France pose mal un problème en parlant de « sentiment anti-français », pour induire la réponse à rechercher dans les émotions des africains. Et qui dit émotion, dit aussi irrationalité.

Si la question est posée à travers une insulte à l’intelligence des africains qui seraient incapables de savoir tout le mal que le pillage de leurs pays par la France leur a causé, c’est bien la preuve qu’on navigue à vue, à cause d’un formatage intellectuel et idéologique des penseurs comme Jules Harmand.

Ils continuent en 2025, à refuser aux africains, toute capacité de réflexion. Pire, le chef d’état-major des armées français est capable de dire le 11 juillet 2025 que l’Afrique a besoin de la France.

C’est le violeur qui continue de présenter son forfait comme une faveur faite à la victime. Les africains répondent, non pas sur l’émotion d’un quelconque sentiment anti-français, mais sur le bilan de deux cents ans de la France en Afrique.

C’est en définitive, ce bilan qui ne passe pas.

Au moment où la Chine pense sa relation avec le monde en termes d’un projet ambitieux structurant de la Nouvelle Route de la Soie rebaptisé, une ceinture, une route, pour créer les conditions d’une prospérité partagée avec les pays où cela se passe, l’élite française reste toujours convaincue qu’elle a la civilisation à apporter aux africains, au lieu de se défendre du déclin que la nouvelle initiative structurante de la Chine, leur cause et qui est de loin une vraie déflagration, comparée à l’aide militaire de la Russie aux trois pays de l’AES.

C’est en cela que je suis heureux de vivre ce moment historique, de transition de déclin des bourreaux du continent africain, pendant lequel, l’Afrique ne se contente plus de commenter les égarements des élites françaises qui nous attribuent l’incapacité de réflexion pour être dans l’émotion permanente et rien que de l’émotion, même pour décrire le tort et l’injustice subis depuis plus de 5 siècles, mais d’avoir le courage de ne plus tendre l’autre joue, mais de se donner les moins pour un jour rendre la gifle.

CONCLUSION

Quand la plupart des intellectuels Français s’entêtent d’imposer en Afrique la hiérarchie raciale héritée de Jules Harmand, les africains éprouvent un sentiment d’humiliation historique qui se traduit par le refus d’assimilation et surtout le rejet des valeurs imposées à travers la domination autoritaire et aux ingérences françaises notamment pour choisir les dirigeants des pays africains et quand ils décèdent, cette France-là ne trouve aucune insulte, aucune indignation de remplacer le vassal à peine décédé au pouvoir par son fils, alors qu’on est bien en République et non dans les Royautés.

Quand Macron s’entête à faire partir son ambassadeur de Niamey à l’été 2023, il est dans un réflexe non contrôlé de la mission civilisatrice française envers les peuples africains.

Il est convaincu en bonne foi de faire quelque chose de bien, pour le peuple du Niger. Il a été à ce point formaté par les idées racistes de Jules Harmand qu’il n’arrive pas à se poser les bonnes questions de ce que cette prétendue mission civilisatrice a fait du peuple du Niger en deux siècles de colonisation française, puisque le pays continue d’être classé comme le pays le plus pauvre du monde.

Il ne sert à rien de se battre contre les moulins à vent. Les penseurs racistes de la colonisation ont créé beaucoup de tort à l’Afrique, mais surtout rendu incapables les colonisateurs français et britanniques de savoir tourner la page d’un passé qui ne finira pas de si tôt de les hanter.

Cela les a en plus rendus aveugles et incapables de voir que l’histoire d’une nouvelle Afrique est en train de s’écrire sans le Royaume Uni, et sans la France et la Russie n’y est pour rien.

Jean-Paul Pougala

Vendredi le 19 septembre 2025

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