Un groupe de média clairement identifié a fait de l’incitation à la haine, à la
discrimination et à la violence verbale à l’égard des Bamiléké son fonds de commerce.
Depuis sa création, Vision 4 notamment, récemment aidé par un certain Bidjoka de la Radio
dite « aux portes des Pyrénées » (FM, 105.8), répand une propagande virulente anti
Bamiléké créant ainsi de l’animosité et une atmosphère hostile à un groupe de Camerounais
clairement identifiés par leur origine ou leur appartenance. Pour qui connait les techniques
de conditionnement social, créateurs de symboles défavorables dans l’imaginaire collectif, Il
n’y a pas meilleur moyen de manipulation mentale pour préparer le terrain au génocide.
Entre l’expression « tuez tous les cafards » lancée par la Radio des Milles collines en
1994 et celle demandant à « dératiser » le Cameroun  entendue à Vision 4, il y a une identité
d’appel au génocide, celui des Tutsi au Rwanda hier et des Bamiléké au Cameroun
aujourd’hui. Décidemment, l’histoire n’apprend rien à certains : dans les années 1930, une
partie des allemands avait traité d’autres allemands dont le seul crime était d’être juifs, de
« pouilleux », de « parasite sale et contaminant », autrement dit de rat, « de parasite
prospérant grâce à la substance des autres », « d’étranger », de « profiteurs obsédés par
l’argent », avec les conséquences que tout le monde connait : 5.5 millions de juifs ont été
exterminés entre 1939-1945. Aujourd’hui, près de 9 millions de Camerounais souvent traités
« d’envahisseurs » ou de « voleurs d’impôts » sont outrageusement qualifiés de « porcs » ou
de « rats » qu’il faut par conséquent exterminer comme pour « guérir le pays d’une maladie
endémique ». Ce qu’il y a de plus révoltant, c’est que ce venin de la haine est déversé dans
un silence assourdissant des ONG de défense des droits de l’homme et plus encore des
autorités publiques alors même qu’elles ont une obligation positive d’intervenir pour arrêter
ce qui n’est ni plus ni moins qu’une atteinte répétitive à la cohésion politique et sociale de
l’Etat.
Qu’une telle attitude soit de l’indifférence est déjà condamnable en soi. Mais quand
on a observé tant soit peu la vie politique camerounaise, on est forcé de conclure que le
silence des autorités publiques relèverait d’une complicité active à l’incitation à la haine
antibamiléké. En effet, depuis le début des années 1990, par une série de manipulation
historique, politique et juridique, les autorités publiques ont cristallisé les différences
ethniques dans le dessein de dresser un obstacle à l’éclosion et à la construction de la
conscience démocratique des Camerounais. Depuis lors, on a fait la promotion du repli
identitaire dans un but unique : conserver le pouvoir politique ; concrètement, entre autres,
on a dévoyé le concept d’autochtone pourtant imaginé par la communauté internationale
pour protéger précisément les populations Mbororo et les Pygmées. Aujourd’hui dans
l’indifférence collective, les Bamiléké sont traités du terme péjoratif « d’allogènes » sans que
les autorités s’en offusquent. La faute est avant tout celle du politique notamment du
législateur : la loi de 2004 sur les Régions qu’on voudra bientôt appliquer, opère une
discrimination entre les Camerounais, au mépris de la citoyenneté ou de l’égalité devant les
charges et dignité publiques en excluant d’office les Camerounais dit « allogène » de la
présidence des régions autonomes.

Le niveau national n’est pas en reste : un ministre de la République a d’ailleurs
affirmé récemment, avec force et vigueur sans soulever désapprobation interne et externe,
qu’un bamiléké ne sera jamais Président de le République du Cameroun, ce qui est une
atteinte au Pacte international relatif aux droits civils et politique de 1966 dont le Cameroun
est partie ; sous le prétexte de redressement fiscal, des hommes d’affaires font l’objet de
représailles par simple soupçon de soutien au MRC caricaturé comme un « parti tribal » et
« ethnofasciste ». Ces quelques exemples n’épuisent pas la liste des outrances observés,
mais donnent à penser que les autorités publiques ont sinon désigné l’ennemi public du
moins aide à construire un ennemi commun à l’ensemble des autres Camerounais. A titre de
comparaison, Il me souvient que sous le régime Nazi, Hitler avait utilisé beaucoup de
stratagèmes pour engendre la haine inconditionnelle des juifs. Pour que son régime
fonctionne « correctement », il lui fallait un bouc émissaire. Aujourd’hui, le Bamiléké semble
représenter le coupable ou le responsable idéal pour cacher l’incapacité du pouvoir à
résoudre les nombreux problèmes que tous les Camerounais, du Nord au sud, de l’Est à
l’Ouest, rencontrent dans la quotidienneté de leur existence.
Faut-il le rappeler, à l’heure de la démocratie, il relève du rôle primordial de l’Etat de
prévenir plutôt que de susciter, esquiver ou exploiter les antagonismes ethniques.
Aujourd’hui, au regard du code pénal, les propos haineux de certains médias ne peuvent
être punis au titre de la lutte contre les extrémismes tribaux contrairement à des pays
comme le Rwanda ou le Burkina-Faso. L’attitude à la Ponce Pilate de l’Etat, va assurément
laisser prospérer l’idée qu’il est sous-traité la campagne de haine contre une partie de la
population camerounaise. Il ne serait même pas exagéré d’y voir une approbation implicite
d’une guerre interethnique que les Camerounais dans leur extrême majorité ne souhaitent
pas, sauf peut-être ceux à qui cela profite. Alors si l’Etat ne chasse pas le virus de la haine et
de la discrimination contre les bamiléké, inoculé au quotidien, autant qu’il sache que c’est
une expérience éternelle que l’instinct de survie poussera fatalement les personnes
concernées à le faire à sa place, avec malheureusement la même sinon plus de violence.
L’exemple du Rwanda avec 800.000 victimes dans les camps des deux protagonistes (Hutus
et Tutsi) devraient nous en dissuader. De même, pour leur gouverne, les pseudo-
journalistes, auteurs récurrents d’incitation à la haine du bamiléké doivent avoir présent à
l’esprit que Valérie Bameriki de la Radio des Mille collines purge actuellement une peine de
réclusion à perpétuité, et Hassan Ngeze a été condamné également à la même peine par le
tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) pour incitation à la haine tribale et crime
contre l’humanité. A bon entendeurs !

Par le Pr WANDJI K.

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