Extrait du rapport du Sénat français 2013/2014, ” 70 MESURES POUR UNE POLITIQUE AFRICAINE RÉNOVÉE “

A. RÉINVESTIR L’AFRIQUE

Longtemps en marge, le continent africain s’impose chaque jour davantage comme un acteur de la croissance mondiale. Le formidable dynamisme démographique de l’Afrique, l’essor de ses entreprises, ses ressources considérables en font une des principales réserves de croissance de l’économie mondiale pour les décennies à venir. C’est pourquoi, il convient de réinvestir l’Afrique et mettre fin au recul de la présence économique française. 1. Définir une stratégie de conquête des marchés africains par filières. L’élaboration d’un Livre blanc sur l’Afrique devrait comporter une partie centrale dédiée à la promotion de nos intérêts économiques, fruit d’un travail commun des principaux acteurs, aussi bien la direction générale du Trésor, qu’UBIFRANCE, la COFACE, la BPI et les syndicats professionnels, le réseau des chambres consulaires.   Les récents travaux menés par le ministère du commerce extérieur pour identifier les couples pays/secteurs gagnants à l’international vont dans le bon sens mais n’accordent pas assez d’importance à l’Afrique.  

411 – Ils ne mentionnent que quatre pays cibles : l’Afrique du Sud, le Nigéria, la Côte d’Ivoire, et le Kenya, sans prendre en compte le potentiel de pays comme l’Éthiopie, le Ghana, le Botswana ou la Mozambique, sans identifier les logiques régionales dans lesquelles évoluent désormais les groupes africains.   Certes, on constate une prise de conscience des responsables gouvernementaux. Nicole BRICQ, ministre du Commerce extérieur, s’est rendue en Afrique du Sud les 14 et 15 octobre, dans le cadre de la visite d’Etat du Président de la République. Il s’agissait du 3ème déplacement de la ministre en Afrique subsaharienne, après le Kenya et le Nigeria mi‐septembre et avant la Côte d’Ivoire, le Ghana et l’Éthiopie d’ici fin 2013. Il ne faut cependant pas oublier que la France conserve des parts de marché importantes, souvent comprises entre 15% et 20%, chez ses partenaires historiques d’Afrique de l’Ouest, qui ont cependant reculé depuis 2000, appelant une action ciblée sur ces pays afin de restaurer ses positions. Pour y parvenir, cela passe, avec plusieurs de ces pays, par la mise en place d’un pacte de co‐production, permettant d’accroître nos exportations, en répondant à leurs exigences en matière de création de valeur ajoutée sur leur territoire et d’affronter ensemble les marchés tiers. Il faut, de ce point de vue, ne pas seulement se focaliser sur les exportations et la fourniture de biens, mais aussi sur des co‐investissements.   Les entreprises françaises ont tout intérêt à s’implanter dans une zone qui sera une des plus dynamiques des prochaines décennies. Le dispositif français est, par ailleurs, encore trop orienté par les grands contrats (aéronautique, matériel de transport, énergie…) décrochés par nos grandes entreprises.   Ceux‐ci, qui sont importants, ne suffisent cependant pas à faire progresser fortement notre part de marché, dans la mesure où ils ne permettent pas d’assurer un flux d’exportations pérenne.   Pour y parvenir, il conviendra aussi de se déployer dans des zones de croissance où les entreprises sont trop peu présentes et où l’Etat n’a pas eu d’action suffisamment structurée, s’agissant de pays d’Afrique anglophones ne se situant pas dans notre aire d’influence traditionnelle. Un travail de mobilisation est nécessaire pour structurer une démarche internationale de filières qui correspondent aux besoins des marchés africains en réduisant la perception du risque qui est souvent surévalué quand il s’agit de l’Afrique.   Par ailleurs, la pratique du portage, qui a connu une nouvelle impulsion avec la signature, en mai 2011, par 20 grands groupes français de la « Charte Pacte Export », doit être amplifiée et adaptée aux réalités africaines. Nombre de nos concurrents « chassent naturellement en meutes ». En France, nous n’avons pas cette tradition. Les pouvoirs publics ont la responsabilité de favoriser cette pratique en rassemblant les grandes entreprises présentes en Afrique telles que Bolloré, Total, Vinci, Bouygues, ou de plus petites entreprises, et de voir comment, selon les secteurs et les géographies, le succès des uns peut tirer les autres.

10) Structurer une démarche internationale par géographies et par secteurs qui correspondent aux besoins des marchés africains, renforcer nos moyens de soutien aux entreprises dans les pays les plus dynamiques tels que l’Afrique du Sud, le Nigéria, la Côte d’Ivoire et le Kenya, mais également l’Éthiopie, le Ghana, le Botswana ou le Mozambique.

11) Développer la pratique du portage des PME par les grands groupes présents sur le continent dans une démarche adaptée aux réalités africaines.

2. Promouvoir des stratégies d’innovation pour des produits et des services destinés au « bas de la Pyramide » La répartition des revenus en Afrique est fortement inégalitaire. Ce fait connu se reflète dans une pyramide dont le sommet est constitué par une faible proportion de personnes à revenus élevés et dont la base est constituée de la majorité de la population à faibles revenus   Pendant de nombreuses années les stratégies internationales des grandes entreprises se sont concentrées essentiellement sur les consommateurs à hauts revenus. Lorsque ces marchés ont été saturés ces entreprises ont porté leur attention sur les marchés des pays émergents en Asie mais également en Afrique. Les populations les plus pauvres situées au bas de la pyramide représentaient un potentiel de marché considérable Leur pouvoir d’achat individuel est faible mais leur grand nombre offre des opportunités de marché considérables. Les grandes entreprises multinationales telles qu’Unilever, Nestlé, Danone et Procter & Gamble se sont déjà lancées dans la conquête des marchés du bas de la pyramide. Par exemple, Nestlé a déclaré que ce segment de marché mondial représentait un domaine stratégique de croissance de l’entreprise   Les stratégies de marketing doivent être complètement révisées et adaptées à ces nouveaux segments de marché Les produits doivent être conçus spécialement pour des consommateurs à faible budget et pour des usages spécifiques Les produits sont dès lors adaptés, notamment en termes de format. En effet, les emballages sont de plus petite taille afin de permettre aux consommateurs pauvres d’acheter des produits à l’unité ou en très faible quantité étant donné qu’ils n’ont pas les moyens d’acquérir de grands volumes à la fois.   Les canaux de distribution doivent également être modulés en fonction des spécificités de ces marchés. Le modèle des circuits de vente traditionnels, petits magasins, stands de rue, etc, se substitue à celui des grands centres de distribution. Les «microdistributeurs» sont au cœur des stratégies de vente des entreprises multinationales sur les marchés des pays pauvres.   Au‐delà des aspects marketing, c’est le processus même de fabrication qui est concerné. De nombreux succès entrepreneuriaux reposent en Afrique sur le concept d’ « Innovation Frugale » où s’opère une rupture des processus d’ingénierie complexes pour construire un produit ou service de manière plus économique adapté au marché africain.  Dans de nombreux secteurs, l’innovation au bas de la pyramide n’est pas une option, mais une obligation. Les Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) offrent, en particulier, de formidables opportunités en termes d’accès durable des populations de la base de la pyramide à des services essentiels comme l’éducation, la santé, les services agricoles ou les services financiers. Ainsi la société M‐PESA au Kenya a créé un système innovant qui permet de transférer de l’argent tant aux utilisateurs de ‐ PESA qu’aux non‐utilisateurs, sans avoir besoin de compte bancaire, via une interface mobile simple. Le service a été lancé début 2007 et compte plus de 13 millions de clients trois ans après sa création. mPedigree est une entreprise privée basée en Afrique qui est née d’une ONG fondée par un entrepreneur social ghanéen. Lancé en 2007, mPedigree travaille avec des opérateurs mobiles et des fabricants de médicaments pour fournir un système efficace de vérification dans la lutte contre la contrefaçon et les faux médicaments, que l’on trouve trop souvent dans les pharmacies et les échoppes en Afrique. Le service est aujourd’hui accessible au Ghana, au Kenya, et au Nigeria. Pour encourager ces initiatives, le groupe de travail propose la création, en partenariat avec Proparco, la filiale privée de l’AFD et des investisseurs privés soit d’un fonds d’investissement soit d’un guichet de l’AFD spécialisé dans des services d’innovation technologique et sociale. Cet instrument de cofinancement financerait des projets RSE/bottom of the pyramid portés par des entreprises françaises. L’AFD cofinancerait des initiatives, répondant à des cahiers des charges précis avec une plus‐value développementale avérée. Etant donné que les conditions locales diffèrent et que les services doivent être adaptés aux spécificités locales, un tel instrument pourrait être partenaire de fonds locaux, plus au courant des conditions de succès dans un endroit donné, afin de réunir une expertise mondiale sectorielle et une connaissance du terrain. Enfin, cet instrument pourrait coupler ses outils financiers avec de l’assistance technique, éventuellement fournie par un groupe de volontaires mis à disposition par des entreprises de technologie de l’information. Le fonds n’investirait que dans des projets ayant une part significative d’investisseurs privés afin de s’assurer de la bonne viabilité des projets et une part d’investisseurs français pour promouvoir l’investissement français en Afrique. …(l’intégralité à disposition si vous le demandez, ou disponible sur le net). Source:Rapport du Sénat Français de 2013/2014

Rappel de la première partie: https://www.youtube.com/watch?v=xRcMpR8_jms&t=43s

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