L’Afrique post-covid sera confrontée à des difficultés de financement de ses importations pour faire face aux pénuries causées par la pandémie. Ce constat n’est pas un scoop. Ces difficultés financières ne sont qu’une goutte d’eau de plus qui s’ajoute à la dette publique abyssale des états.

Tous les pays de la planète, riches ou pauvres, sont confrontés, à des degrés divers et aux mêmes difficultés de relance de leurs économies. C’est pourquoi nous pouvons nous interroger sur les dispositions qui seront prises au cours du sommet sur le financement des économies africaines, sous la houlette d’Emmanuel Macron à Paris.

Cet énième sommet est une sanctuarisation de l’aide au développement. Les pays africains en profitent pour réclamer un moratoire immédiat sur le service de toutes les dettes extérieures jusqu’à la fin de la pandémie. A cette occasion, ils ont aussi exhorté le FMI à leur attribuer des Droits de Tirage Spéciaux (DTS) pour les liquidités indispensables à l’achat de produits de base et de matériel médical essentiel. La cagnotte des fameux « DST » pèse 650 milliards de dollars. Elle est partagée entre les pays pauvres et les pays riches à qui revient la part du lion. Quel montant sera alloué à l’Afrique ? Juste 5%, c’est-à-dire 34 milliards de dollars. Cette somme doit permettre à l’Afrique d’importer des produits fabriqués hors du continent et qui gonfleront encore la balance du commerce extérieur des pays lourdement déficitaires.

De quoi parlera-t-on exactement :

  • Du financement et du traitement de la dette publique ;
  • Du secteur privé africain.

Le bilan des économies de l’Afrique post coloniale est une constante : une dette endémique et incontrôlée. Certes, tous les pays assument une dette qui de plus en plus a tendance à exploser. Mais en Afrique, les plans successifs de relance ne permettent pas de dynamiser les secteurs créateurs de richesse. L’Afrique anglophone reste cependant un bon élève. Ce n’est pas le cas de l’Afrique francophone formatée à l’assistanat et dont la devise, le franc CFA est un instrument d’avilissement qui ne permet pas le développement économique des pays soumis à cette devise.

Le sommet de Paris, supposé sauver l’Afrique de l’asphyxie financière peut être un bol d’air pour les pays anglophones. En effet, ils disposent de leurs propres monnaies qui ne sont pas indexées d’office à une monnaie étrangère même si elles subissent aussi les bourrasques des fluctuations monétaires. Le sommet de Paris sur le financement des économies africaines est un leurre. C’est plus un effet de communication qu’une volonté réelle pour aider l’Afrique à se développer. Les sommes allouées ne financent pas la création des richesses. C’est un coup d’épée dans l’eau.

Ce sommet est un acte de diversion pour masquer les politiques de règne sans fin des présidents en exercices. Il ne saurait être une solution pour les pays francophones dont le problème majeur est le respect des constitutions et l’abandon d’une monnaie de servitude qui est le franc CFA. Une monnaie qui va bientôt être remplacée par l’Eco qui n’est qu’une version édulcorée du franc CFA arrimée à l’Euro.

Chronique d’un échec annoncé

Les sommets France-Afrique se suivent et se ressemblent. La différence aujourd’hui est la participation des pays d’Afrique anglophone. Ces sommets ne changeront pas la situation économique dans le continent. La raison est simple. La mauvaise gouvernance est un lourd handicap aux initiatives privées qui constituent le fer de lance des économies libérales. Or, en Afrique, et plus particulièrement en Afrique francophone, les gouvernances à vie et les successions dynastiques portent la couleur des échecs d’avance programmés.

Dans les pays anglophones d’Afrique, le sens de la propriété est très ancré dans les mentalités même si cela n’exclut pas la corruption. La différence avec les pays d’Afrique francophone est très largement décriée. Les fonctionnaires, tenant de l’orthodoxie, pratiquent égoïstement une corruption qui ne profitent qu’à eux et à leurs cercles.

L’Afrique a jusqu’ici mieux résisté aux dégâts liés à la pandémie. Mais qu’est-ce qui justifie alors un sommet pour la sauver de l’asphyxie financière ? Les dirigeants africains, européens et les organisations économiques internationales peuvent-ils sauver un soldat d’avance sacrifié ? Là est le dilemme.

Pour sortir du cercle vicieux de la corruption, l’Afrique a besoin de respecter ses institutions pour une gouvernance d’alternance. Les dons, les emprunts et les aides au développement ne suffisent pas. Cet argent ne profite qu’à ses prédateurs historiques qui renforcent leurs influences face à des hommes et des femmes blotties. L’opacité de la gestion des ressources des pays africains créent la pauvreté du plus grand nombre et la dépendance chronique des mendiants volontaires.

Éradiquer la pauvreté en Afrique est possible. Pour y parvenir, il suffit de rompre avec les politiques des oligarchies en place par une gestion plus transparente qui débouchera sur le respect des institutions et de la bonne gouvernance. La bonne gouvernance tolère l’esprit critique. Elle est la source de l’émulation, de la promotion sociale, du mérite et de l’effort individuel qui entraînent l’effort collectif.

L’Afrique doit s’engager à respecter ses institutions, à créer sa propre monnaie qui ne s’indexera sur aucune monnaie étrangère. Tant que ces conditions ne seront pas réunies, les programmes d’aides au développement des institutions financières (Banque Mondiale, Fonds Monétaire International) ne produiront aucun effet salvateur.

Par Michel Lobé Étamé
Journaliste Indépendant

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