Alors qu’en Guinée le pays est presque en crise avec la volonté du Président Alpha Condé de briguer un troisième  mandat. Au Sénégal, des  hommes  proches du Chef de l’Etat ont relancé  le débat cette semaine, créant  un véritable  imbroglio

Le président Sénégalais, Macky Sall, a célébré en février l’an 1 de sa réélection après un mandat de  sept ans qui avait  pollué ce  paisible pays connu pour sa tradition démocratique avec deux alternances réussies. En effet, lors de  la campagne électorale en 2012, face à  Me Abdoulaye Wade, Sall avait fait  la promesse de réduire son mandat de sept ans  à cinq  ans. La suite, on la connait…

Deux  poids, deux  mesures

A  peine  réélu  pour  un second  mandat, l’idée  d’un troisième  mandat  avait  été agitée  par  quelques éléments de son parti. «Je pense que la Constitution est assez claire. En principe, c’est le deuxième et dernier mandat du chef de l’État». C’était la réponse servie par l’ancien  ministre de la Justice, Ismael Madior Fall à  une question sur un éventuel troisième mandat de Macky Sall. Une question à laquelle la réponse apportée par le ministre de la Justice avait fini d’installer le doute dans la tête de certains  Sénégalais. Une volonté vite noyée  par les différentes déclarations antérieures du président Sall  qui disait ouvertement  être  contre  l’idée d’un troisième  mandat.   Le temps  selon lui  était au travail, invitant  les  éléments de son parti  à ne  plus se  prononcer sur  ce sujet. Le  premier à subir le sabre du  président  Sall  fut l’ancien  Directeur  des Sénégalais  de  l’Extérieur  Sory Kaba  qui  avait clairement indiqué que le président Macky Sall entamait son dernier mandat puisque  la Constitution lui interdit d’en briguer un autre.  Il fut  démis dans  les  minutes qui  ont suivi  sa déclaration avant que  l’ancien ministre – conseiller,  Moustapha  Diakhaté, subisse  le  même sort. Depuis lors, les éléments du parti au  pouvoir  faisaient  dans la prudence, fuyant les questions des journalistes sur cette brûlante question  qui semble indisposer  le président  sénégalais. Interrogé  par  la presse après son discours  du nouvel. Sa  réponse  du ni  oui ni non ne dissipa pas  les doutes  et le débat  sur cette question  ne  cessa  point. « Si je dis que je ne serais pas candidat, les membres du gouvernement ne vont plus travailler, chacun va essayer de se positionner. Si je dis que je serai candidat, une vive polémique va s’ensuivre », avait d’ailleurs assuré  Macky  Sall devant les médias, rappelant qu’il n’avait pas de dauphin désigné.

La semaine  dernière, l’ancien Premier ministre et actuel Secrétaire général de  la  présidence  de la République, Mahammad Boun Abdallah Dionne, s’interrogeait sur la pertinence de la limitation du mandat présidentiel.  Un ballon de sonde ?  Nul ne sait. Toujours est- il que , invité  par  une  télévision de la place dans  un débat  en wolof (  une des langues usitées du  pays)  son ancien  ministre  de l’Intérieur  et actuel ministre d’Etat et Directeur des structures du parti  au  pouvoir, M.  Mbaye  Ndiaye, se  fit  plus  précis  que  l’ancien Premier ministre.  Il déclara péremptoire que Sall a le droit de se représenter en 2024, puisqu’en vertu de la révision constitutionnelle de 2016, il est à son premier mandat de cinq ans et il a la possibilité de briguer un autre de cinq ans.

Poignées  de mains Macky   Sall et Idrissa  Seck

Et plutôt que d’être sanctionnés  comme  ceux qui avaient  émis  l’idée que  le président Sall était à son dernier mandat, les deux  hommes  sont toujours  en fonction.

En plus de  ce front autour  d’un troisième  mandat, un autre est  ouvert à l’intérieur  même  du  parti  au pouvoir  où  des hommes   proches de  la Première Dame, Marième  Faye  Sall, accusent  certains  éléments d’avoir des  ambitions  cachées.  Et cette  semaine, ils ont  été  plus  précis  en désignant l’ancien Premier  ministre et actuelle  Présidente du Conseil Economique  Social et Environnemental, Mme Mimi  Touré,  et  l’ancien patron du  ministère des  Finances  et actuel  ministre  des Affaires étrangères, Amadou Ba. Dans ce jeu  de relance  pour  un troisième  mandat, il  est bizarre que  l’opposition ne se  soit pas  prononcé, laissant  le débat en cours  dans  les réseaux sociaux.

La  semaine dernière, la  poignée  de  mains entre  le  Président Sall et  Idrissa  Seck, considéré  comme  le chef de  l’opposition,  avait alimenté  les débat traçant les lignes d’une  éventuelle  réconciliation entre  les deux  hommes.  Mais  en politique, ce  ne  sont pas  des  poignées de mains  qui créent  des rapprochements.  Alors   donc que  ça bruit  l’idée  d’un troisième  mandat, la rue  gronde et hurle  pour  la libération de Guy Marius, le leader du groupuscule France dégage  Sagna  en  prison depuis   trois  mois.  Il  a été arrêté devant les grilles du palais présidentiel pour « rassemblement non autorisé » contre la hausse du prix de l’électricité.

Mais  l’impression qui  se dégage  autour  de cet imbroglio  autour du 3ème mandat est que l’actuel   régime n’a rien retenu de l’histoire toute récente de ce pays. Me Abdoulaye  Wade, le  prédécesseur de Sall   était convaincu que les manifestations contre un troisième mandat n’aboutiraient à rien, « une brise est un vent léger qui secoue peut être les feuilles des arbres, mais ne sera jamais un ouragan », professait-il. La suite, on la connait.

Par Alika Boye

Related Posts