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Voici comment pendant 10 ans, les Etats-Unis ont utilisé l’Ukraine pour arriver à une partition et spoliation de la Russie, à travers un nouveau Traité de Versailles

( Extrait de la Leçon d’intelligence stratégique n° 1494 de Jean-Paul Pougala, à lire dans son intégralité sur www.pougala.net)

“La Russie n’a jamais perdu la guerre froide… parce que la guerre froide n’est pas finie.” Vladimir Poutine

Si nous parlons aujourd’hui de la guerre en Ukraine, tout cela est l’œuvre d’une erreur historique d’un homme, nommée Mikhaïl Gorbatchev, avec une idéologie foireuse nommée « Perestroïka ».
Mikhaïl Gorbatchev, a pêché en bonne foi en croyant qu’on peut tendre la main aux Etats-Unis pour construire une amitié sincère.

Cela veut dire qu’il n’a pas lu Karl Marx sur la vraie nature du capitalisme, pour arriver à faire confiance aussi aveuglement.
Dans son livre-programme intitulé : « Mikhaïl Gorbatchev, Perestroïka i novoe mychlenie dlia nacheï strany i dlia vsevo mira », publié à Moscou, par Politizdat, en 1987, on peut lire aux pages 170 et 173 tel que traduit en français à Paris, par Flammarion, en 1987, ceci :

La « doctrine Gorbatchev » a comme point de départ, « l’interdépendance croissante de la communauté internationale en politique étrangère », « au nom des intérêts communs de l’humanité et de la vie sur la terre ».

Dans cette doctrine Gorbatchev, connue aussi sous le nom de « Nouvelle pensée » son auteur parle de la possibilité de créer un monde plus sûr et plus juste, avec l’Occident. Il propose « de passer par-dessus tout ce qui divise ».

Et bien entendu, si nous sommes tous frères et sœurs, avons-nous besoin de développer tous ces arsenaux nucléaires pour nous détruire les uns les autres ? Bien sûr que non et hop, le voilà qui propose à l’Occident de se débarrasser des armes, en montrant l’exemple à travers de fortes réductions des arsenaux militaires de son pays et des pays de son alliance, le Pacte de Varsovie. En échange, ses vis-à-vis Américains lui avaient promis de ne jamais élargir l’Otan vers les pays de l’ancien Pacte de Varsovie, au nom de « valeurs communes à l’humanité » qu’il prônait et il y a cru. Résultat des courses, ce sont ces pays-là (Pologne, Estonie), qui sont les plus virulents contre la Russie, depuis que l’Otan a installé ses bases militaires dans ces pays.

Gorbatchev a pêché par naïveté et par imprudence, lorsqu’il a fait confiance à la « théorie de la convergence, pour la rencontre l’un de l’autre », que lui proposait l’Occident.
Malheureusement, il n’avait pas lu le Général de Gaulle qui en 1963 disait ceci des Américains : « Nous devons garder les mains libres. Or c’est justement ce que les Américains veulent éviter. Ils ne veulent pas que leurs alliés disposent d’une indépendance stratégique, et donc politique. Ils sont résolus à abolir leurs alliés ».

EPILOGUE

Dans “La Russie et l’Occident : des illusions au désenchantement”, Vyacheslav Nikonov écrit :

A la fin des années quatre-vingt et au début de la décennie suivante s’est produit l’un des événements les plus inattendus et les plus mystérieux de l’histoire de l’humanité. Une superpuissance – l’Union Soviétique – s’est, de son plein gré, privée de ses alliés et a cédé toutes ses positions sans rien exiger en échange ; puis elle s’est effondrée en donnant naissance à quinze États indépendants.
Et Henry Kissinger, de commenter cette tragédie ainsi :
« Aucune grande puissance ne s’est jamais désintégrée aussi radicalement et aussi rapidement sans avoir été vaincue par les armes ». Henry Kissinger, dans “Diplomacy”, New York, Touchstone, 1995, p. 763.

En Mai 2000, Vladimir Poutine, est élu président la Fédération de Russie, succédant à Boris Eltsine.

Le 21 décembre 2021, lors d’une réunion du Conseil des Droits de l’Homme (CDH), le président russe Vladimir Poutine explique comment les Etats-Unis ont créé en Russie, la figure des Oligarques qui ont mis la main sur les entreprises du pays ; il explique que ce sont des espions de la CIA qui ont, dans les années 90, contribué aux privatisations du système économique en Russie, quelque temps après l’effondrement de l’Union soviétique. Il dit plus précisément :

« Des cadres de la Central Intelligence Agency américaine ont travaillé directement en Russie, occupant des postes officiels au sein du gouvernement et travaillé comme conseillers au milieu des années 90 et au début des années 2000 », (…) des spécialistes américains se trouvaient sur les sites d’infrastructures nucléaires : « ils s’y rendaient tous les jours pour y travailler ». (…) « Vous pensez qu’il s’agit d’un cas isolé d’ingérence dans les affaires intérieures de la Russie. Non, il y en a beaucoup d’autres… Tout était sous le contrôle de certains pays ».

Dimanche le 25 février 2024, il y avait à la une du quotidien américain un titre :
“The Spy War: How the C.I.A. Secretly Helps Ukraine Fight Putin” (La guerre des espions : comment la CIA Aide secrètement l’Ukraine à combattre Poutine)

Sous-titre : For more than a decade, the United States has nurtured a secret intelligence partnership with Ukraine that is now critical for both countries in countering Russia. (Depuis plus d’une décennie, les États-Unis entretiennent avec l’Ukraine un partenariat secret en matière de renseignement, qui est désormais essentiel pour les deux pays dans leur lutte contre la Russie.)

On apprend ainsi que la guerre en Ukraine dont on commémore les 2 ans, ne dure pas en effet depuis 2 ans, mais c’est depuis 10 ans que les Etats-Unis utilisent l’Ukraine pour mener discrètement une guerre pour détruire la Russie.
Les auteurs de cet article, Adam Entous et Michael Schwirtz écrivent :


« Maintenant entré dans la troisième année d’une guerre qui a coûté des centaines de milliers de vies, le partenariat en matière de renseignement entre Washington et Kiev est un pilier de la capacité de l’Ukraine à se défendre.

La C.I.A. et d’autres agences de renseignement américaines fournissent des renseignements sur les frappes de missiles ciblées, suivent les mouvements des troupes russes et aident à soutenir les réseaux d’espionnage. Mais ce partenariat n’a pas été créé en temps de guerre et l’Ukraine n’en est pas non plus le seul bénéficiaire. Il a pris racine il y a dix ans, se réunissant par à-coups sous trois présidents différents des États-Unis (Obama, Trump et Biden).

Cela a transformé l’Ukraine, dont les agences de renseignement ont longtemps été considérées comme profondément compromises par la Russie, en l’un des partenaires de renseignement les plus importants de Washington contre le Kremlin aujourd’hui. (…)

Le poste d’écoute situé dans la forêt ukrainienne fait partie d’un réseau de bases d’espionnage soutenu par la CIA et construit au cours des huit dernières années, qui comprend 12 emplacements secrets le long de la frontière russe. Avant la guerre, les Ukrainiens ont fait leurs preuves auprès des Américains en collectant des interceptions sur la Russie.

Et la C.I.A. a également contribué à former une nouvelle génération d’espions ukrainiens qui ont opéré en Russie (assassinat de la journaliste et philosophe Daria Douguine, fille de l’idéologue d’Alexandre Douguine, le 21/08/2022 revenant d’un festival dans la banlieue ouest de Moscou), à travers l’Europe, à Cuba et dans d’autres endroits où les Russes sont largement présents. (…)
Les détails de ce partenariat en matière de renseignement, dont beaucoup sont divulgués pour la première fois (ici) par le New York Times, sont un secret jalousement gardé depuis une décennie. Dans plus de 200 entretiens, des responsables actuels et anciens de l’Ukraine, des États-Unis et de l’Europe ont décrit un partenariat qui a transformé l’Ukraine en une plaque tournante de collecte de renseignements qui a intercepté plus de communications russes que la CIA. ( …)

(Malgré l’aide américaine, l’Ukraine n’arrive pas à prendre le dessus sur la Russie). Pour tenter de rassurer les dirigeants ukrainiens, William J. Burns,directeur de la C.I.A, a effectué une visite secrète en Ukraine le 22 février 2024 dernier, sa 10ème visite depuis l’invasion (…)

M. Poutine accuse depuis longtemps les agences occidentales de renseignement d’avoir manipulé Kiev et semé un sentiment anti-russe en Ukraine. Vers la fin de l’année 2021, selon un haut responsable européen, M. Poutine se demandait s’il devait lancer son invasion à grande échelle lorsqu’il a rencontré le chef de l’un des principaux services d’espionnage russes, qui lui a dit que la CIA, en collaboration avec le Royaume-Uni, Le MI6 contrôlait l’Ukraine et en faisait une tête de pont pour les opérations contre Moscou. (…) »

En d’autres mots, inutile de dire qu’on fête des deux ans de la guerre en Ukraine, puisque selon cet article du New York Time d’hier dimanche 25/02/2024, il vaut mieux fêter les 10 ans, lorsque les Etats-Unis ont commencé à utiliser l’Ukraine pour affaiblir la Russie et qui fait que le 24 février 2022 n’est que l’épilogue de cette longue série qui durait depuis 8 ans.

Mais la question qui nous intéresse à ce point est : Pourquoi les Etats-Unis qui dominent le monde depuis 142 ans, sentent-ils le besoin de détruire la Russie ?

Samedi le 24 février 2024 pour commémorer les deux ans de la guerre en Ukraine, dans un article intitulé : ” The reasons for this useless war and how to get out of it ” (“Les raisons de cette guerre inutile et comment en sortir”), sur sa page web, jeffsachs.org, l’économiste américain, Jeffrey Sachs, consultant spécial du secrétaire général des Nations Unies et enseignant à l’Institut de la Terre de l’université Columbia, écrit :

“The Ukrainian war is two years old. Two years of massacres, deaths, destruction and economic disruption that could have easily been avoided. The truth has come out: this is a war caused by a cynical thirty-year effort by the United States to keep Russia weak, including through NATO expansion into Ukraine”
(La guerre en Ukraine dure depuis deux ans. Deux années de massacres, de morts, de destructions et de perturbations économiques qui auraient facilement pu être évitées. La vérité est apparue : il s’agit d’une guerre provoquée par un effort cynique des États-Unis pendant trente ans pour maintenir la Russie faible, notamment par l’expansion de l’OTAN en Ukraine.)

Maintenir la Russie faible !

De quoi parle Jeffrey Sachs ?

Juste un exemple pour bien me faire comprendre : si la Russie était faible, l’audace des pays du sahel aurait déjà été étouffée par la France, pour éviter de faire des émules. Une Russie forte, aide les opprimés qui ont le plus d’intérêt à contester l’ordre mondial actuel, qui bien évidemment, ne leur convient pas.

Beaucoup de gens en Afrique ne savent pas que si jusqu’à maintenant, les trois pays de l’AES (Mali, Burkina et Niger), n’ont réussi à choisir leur route, jusqu’à annoncer leur sortie de la CEDEAO et que cette dernière se précipite à annoncer qu’elle lève subitement toutes les sanctions, que parce que la Russie était forte.
Vous allez me demander où se trouve le lien entre la Cedeao et la Russie n’est-ce pas ?

Vous vous rappelez lorsqu’en Aout 2023, la Cédéao menaçait d’intervenir militairement pour chasser les militaires au pouvoir au Niger ?

Question : Pourquoi ne l’ont-ils pas fait.

Réponse : parce que les deux pays, où avaient eu lieu précédemment les coups d’état, le Mali d’abord et le Burkina ensuite avaient eu l’intelligence de s’appuyer immédiatement sur une alliance militaire avec la Russie.

Le président de Cote d’Ivoire Ouattara s’était même moqué d’eux en disant qu’ils avaient fait le mauvais choix, d’un pays qui avait le PIB égal à celui d’Espagne avait-il dit.

Quand la CEDEAO menace d’intervention militaire, en réalité, c’est la France qui devait intervenir, sous couverture de la Cédeao, avec ses 1500 militaires stationnés à l’aéroport de Niamey.

Sauf qu’il y a quelque chose qui s’est passé et le peuple n’y a vu que du feu. Les deux pays, le Mali et le Burkina décident d’envoyer 300 camions de vivres pour aider leurs frères du Niger et en même temps, annoncent qu’une guerre contre le Niger serait une guerre contre les deux autres.

Vous croyez franchement que ces camions ne contenaient que des vivres comme officiellement annoncés par le Mali et le Burkina ?

C’est là où on comprend l’incohérence de la ministre allemande des affaires étrangers qui va à Bamako, décourager les Maliens de recourir à la Russie pour combattre les terroristes islamistes, le même jour où son président de la République se rendait à Kiev pour dire que l’Ukraine était libre de choisir avec quelle alliance militaire construire sa sécurité.

La vérité est que moins d’une semaine après le coup d’état, pendant que la France se préparait à intervenir militairement, les services secrets militaires français annonçaient à Macron, que si la France déclenchait une guerre sous couvert de la CEDEAO, elle n’aurait pas eu à faire aux militaires nigériens mal équipés, mais aux militaires russes qui venaient de s’entrainer à une guerre à haute intensité en Ukraine et qui auraient battu à plate couture l’armée française, avec autant d’humiliation, que la France aurait été battue par le Niger, puisqu’officiellement, la Russie n’apparaissait nulle part.

C’est en définitivement la raison principale qui a dégonflé Macron qui avait promis de ne pas rappeler son ambassadeur, convaincu comme le disaient les spécialistes guerriers français en pantoufles sur les plateaux de télévision comme BFMtv, LCI et France24 : « au premier coup de fusil de l’armée française à Niamey, les militaires nigériens auraient fuit ».

Sauf qu’au premier coup de fusil, les choses ne se seraient pas passées comme elles se passent d’habitude, à cause de la Russie de Poutine, qui a décidé de mettre le pied dans le plat partout où elle peut contester l’hégémonie américaine.

Questions : Pourquoi la Russie veut-elle contester l’hégémonie des Etats-Unis ? Et Pourquoi comme le dit Jeffrey Sachs, c’est depuis 30 ans que les Etats-Unis travaillent pour l’affaiblir ?

Réponse : A la chute du mur de Berlin en Novembre 1989 et la chute de l’URSS, les Etats-Unis ont commis l’erreur de se proclamer le vainqueur de cette séquence où elle n’avait pourtant joué aucun rôle.

Quand dans un conflit, tu gagnes, tu imposes au perdant ce qu’il doit faire. Napoléon a perdu toutes ses guerres et la conséquence est qu’il a laissé la France avec une superficie inférieure de celle qu’il avait trouvée à son arrivée. C’est la conséquence immédiate de la défaite.

L’Allemagne a perdu soit la premier que la seconde guerre mondiale et les conséquences ont été immédiates, elle est littéralement humiliée par le Traité de Versailles lourdement sanctionnée.

A la fin de la première guerre mondiale, pendant près de six mois, trente-deux nations travaillent sur le texte, à faire signer à l’Allemagne, mais pas l’Allemagne qui n’assiste pas aux débats sur ce que sera son avenir, puisqu’elle est tenue responsable de la guerre et doit payer pour cela.

Le 28 juin 1919, le traité de Versailles est signé, mettant fin officiellement à la première guerre mondiale.

L’Allemagne perd 15% de son territoire, doit rendre l’Alsace et la Lorraine à la France et d’autres territoires au Danemark. Son armée est aussi limitée à 100.000 personnes et l’empire colonial allemand est démantelé. Le pays perd ainsi ses colonies africaines dont le Cameroun, le Togo, la Tanzanie et la Namibie.

Depuis 30 ans, les Etats-Unis se sont proclamés par erreur victorieux de la guerre froide, mais sans les avantages qui vont avec le vainqueur. Tout simplement parce qu’ils ne sont pas les vainqueurs. Alors, il lui faut encercler la Russie, avec l’Otan et l’obliger dans une guerre où elle sortira perdante, ainsi on lui fera comme à l’Allemagne, un nouveau Traité de Versailles pour spolier le pays le plus vaste au monde, avec ses 17 millions de km2 et ses innombrables ressources naturelles.

C’est ce qui explique la frénésie et l’unanimité suspecte de tout l’occident en faveur de l’Ukraine. En réalité, tous se fichent de l’Ukraine.

Tous ces journalistes qu’on voit à longueur de journée nous expliquer sur LCI que la Russie va perdre, donnent les garanties de leur soutient pour les probables gagnants de demain contre la Russie, pour participer eux aussi au festins, tels des charognards devant leur proie immobilisée par une guerre qu’ils espéraient courte et victorieuse.

Mais les choses ne se passent malheureusement pas pour eux, comme prévues. Malgré toutes les armes fournies par 40 pays de l’Occident à l’Ukraine, et les deux cents milliards de dollars en deux ans, rien n’y fait, elle n’arrive pas à plier la Russie.

Et c’est même cette dernière qui avance, et ce revers imprévu de l’Ukraine est vécu très mal, par tous ces intellectuels en Occident qui espéraient devenir riches grâce à la spoliation future de la Russie et les voilà, tels de perroquets nous répéter à tue-tête : « La Russie ne peut pas gagner », « La Russie ne doit pas gagner » !

Est-ce qu’on gagne ou perd une guerre par incantation ?

Jeffrey Sachs nous révèle que l’élargissement de l’Otan n’avait aucun objectif d’assurer la sécurité des anciens pays du pacte de Varsovie sous la Russie, mais un prétexte pour pousser la Russie à déclencher une guerre que les Etats-Unis auraient utilisée pour armer en sous-main les pays satellites pour contraindre la Russie à la défaite et l’obliger à passer à table pour écouter ce qu’on lui réserve dans un nouveau Traité de Versailles.

Jean-Paul Pougala

Lundi le 26 février 2024

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