(édito)

La guerre se poursuit à Gaza et un nouveau front vient de s’ouvrir en Iran. Le monde est en ébullition.
En Afrique noire, les prises de position se multiplient pour des guerres lointaines. Pourquoi les africains
s’émeuvent-ils des guerres hors de leur continent alors qu’ils restent muets et insensibles sur celles qui
se déroulent sur leur propre sol ?
De nombreux phénomènes peuvent expliquer le sentiment de compassion qui anime les populations : la
religion, les médias conventionnels, les réseaux sociaux et la géopolitique. Les musulmans d’Afrique
noire soutiennent massivement la Palestine. Les chrétiens se sentent moins concernés. Cet engouement
s’explique par la place des religions importées dans la société africaine. Elles sont durablement
installées dans un continent où la bible et le coran sont devenus des livres de chevet. Dieu ne discrimine
pas ses enfants.
Ainsi, malgré les conflits qui éclatent tous les jours en Afrique noire, le peuple est convaincu que la
volonté de Dieu s’exprime et que la victoire divine est la plus forte. Or, si nous nous référons à l’histoire
contemporaine et si nous prenons le risque de remonter plus loin, les puissants ont toujours déclenché
les conflits et imposé leur loi. L’Afrique noire en est la victime expiatoire. Elle a été ravagée par les
conquérants occidentaux et arabes qui ont fait de l’homme noir un esclave docile, condamné à respecter
les saintes écritures et à se soumettre fidèlement aux préceptes religieux. La férocité de cette époque
n’est pas si lointaine et elle se pratique encore à moindre échelle au Proche-Orient.
Cette vérité est occultée par les intellectuels et croyants de tous bords en Afrique noire. En effet, dans
les deux manuels sacrés (coran et bible) qui circulent librement pour favoriser la vie en commun, l’amour
et le respect de l’autre sont très largement prônés.
L’africain dépense des sommes colossales pour aller se repentir à Rome où à la Mecque pour expier ses
péchés. Mais de quels péchés est-il responsable puisque ses bourreaux n’ont jamais changé leur
stratégie de domination et de soumission ? Rappelons-nous de cette phrase liminaire de l’ancien
président français, Jacques Chirac : « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs ». N’est-ce pas la
triste vérité qui illustre nos comportements ? Donnons à notre Afrique ce que nous lui devons.
La guerre n’a pas de frontière. L’Afrique n’a jamais trainé une réputation belliqueuse. Elle subit, malgré
les générations, avec la complicité active de ses dirigeants, la foudre de ses grands maitres décidés de
la maintenir à l’écart de la « civilisation ».
Toutes les guerres sont condamnables. Les bombes ne font pas le tri des victimes. C’est ainsi que l’on
meurt à tout âge et quelque soit le sexe et la couleur de peau. La compassion s’exprime dans tous les
débats hors des champ de batailles. Nous maudissons les agresseurs et nous nous égoïsons, à
longueur de journée, à condamner les oppresseurs et à maudire la nature qui nous a créés égaux.
L’Afrique noire est en ébullition. Elle condamne sans réserve Israël, la Russie et les USA. Elle se tient
aux côtés des palestiniens, des ukrainiens et maintenant des iraniens. Ce comportement est la marque
de la guerre cognitive qui a gangrené nos cerveaux et qui nous pousse à épouser des causes lointaines.
Nous oublions les conflits meurtriers qui déchirent et déciment nos populations lassées des guerres
fratricides.
Et si nous nous disions la vérité ? Notre cause n’a jamais été au centre de nos préoccupations. Nos
populations ignorent que tous les jours, les morts se comptent par milliers en République Démocratique
du Congo, au Soudan, dans tous les Etats du Sahel, au Bénin, au Cameroun, en République
Centrafricaine, au Bénin, au Tchad, au Mozambique, etc. Avouons que les poches de guerre sont si
nombreuses que l’on ne saurait les énumérer tous. Le jihadisme s’est durablement installé. Dans un
contexte social agité et instable, les investisseurs se font rares. Les Etats devraient mutualiser leurs
forces par des projets endogènes afin de créer des conditions efficaces qui éradiqueraient cette pieuvre
qui nous décime en toute impunité.
Nos partenaires arabes ou du Maghreb veulent imposer la sharia en Afrique noire. Ils n’éprouvent
aucune compassion pour les victimes innocentes d’un jihadisme aveugle. En RDC, le m23 est suréquipé
et ouvre un front qui exploite les terres rares destinées à l’industrie en Occident.
Qui pour sortir l’Afrique noire de sa grande léthargie ? Consacrons-nous à briser les chaines qui nous
étouffent au point d’oublier que nous sommes des humains et que nous avons tous droit au bonheur de
passer quelques années sur terre.

Par Michel Lobé Etamé
Journaliste Indépendant, essayiste et romancier

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