En réponse aux revendications salariales des enseignants camerounais dont certains ont à ce jour plus de 10 années de salaires impayés, le gouvernement BIYA a déployé, comme à son habitude, son arme atomique : la stratégie de la montre, de l’argent, de la force, des astres et de la division.

  • La montre, comme le vieillissement, c’est la croyance en l’usure du temps, en l’étiolement de toute énergie dans la durée, finalement, en l’essoufflement et au dépérissement de toute action humaine qui ne produit pas de résultat après un certain temps.

Alors que l’on espérait le déploiement d’une véritable OPERATION – COMMANDO, menée par une commission ad-hoc, dans laquelle seront représentés les enseignants, les services décentralisés du ministère de l’éducation nationale, les services concernés des ministères de l’éducation, de la fonction publique et des finances, avec pour mission de traiter dans un délai très bref, les dossiers, on a plutôt vu se déployer une offensive communicationnelle du gouvernement camerounais dans le but de gagner du temps, de réduire la ferveur revendicationelle des enseignants.

NGOH NGOH ALIAS PAUL BIYA NE VEUT PAS PAYER LES SALAIRES DES ENSEIGNANTS

On ne peut pas payer sur une même année budgétaire plusieurs années de salaires de plusieurs milliers d’enseignants. Était-ce prévu dans l’élaboration du budget en cours d’exécution ? La réponse est évidemment NON.

La preuve du sérieux du gouvernement aurait été le vote en urgence à l’Assemblée Nationale, d’une loi de finance rectificative, afin d’intégrer cette dépense imprévue dans le budget en exécution. Les finances publiques ne sont pas engagées simplement « sur hautes instructions » même si on est au Cameroun.

Par ailleurs, le déploiement d’une maigre installation bureautique avec laquelle on ambitionne d’absorber jusqu’à 10 années de retard de traitement pour certains dossiers, est une vraie plaisanterie managériale, une communication de mauvais goût. On ne peut absorber en situation normale de gestion ce qu’on n’a pu régler au moins sur le plan administratif en 10 années.

En réalité, la surcommunication gouvernementale trahit son inaptitude ou son absence de volonté de régler dans des délais brefs la crise en cours. Quand une démarche est vraie, juste et pertinente, elle n’a pas besoin d’être aussi grossièrement promue, vendue, son efficacité se vend d’elle-même.

  • l’argent viendra au soutien du temps et permettra de corrompre massivement les média de service, les leaders enseignants qui se seront distingués et ainsi émousser leur ardeur.
  • Les astres, entendus ici comme la croyance en des forces mystiques qui font et transforment tout chez Paul BIYA, n’a pas d’équivalent connu. Ainsi, l’absence de politique ambitieuse de traitement de la situation professionnelle des enseignants, gage du devenir du Cameroun, procède simplement de cette logique : on attend, et les astres feront le reste. Dans un passé récent, il n’a pas hésité à offrir à des ordres mystiques probablement pour « services rendus », plusieurs milliards de nos francs CFA qu’il refuse de payer aux enseignants aujourd’hui.

Dès lors, tout le génie politique du gouvernement, se résume en la gestion de la montre, en la gestion du temps politique, en la croyance mystique que les astres finiront par tourner, par s’aligner, dans le sens de ses intérêts et que tout redeviendra comme avant, ou s’arrangera…

–  La force pourra être déployée comme ultime recours, quand cette impéritie  génère une situation incontrôlée. Comme mû par un instinct bestial, sauvage, tel un éléphant qui décide d’écraser une  automobile dont il ne comprend ni l’utilité, ni le mode de  fabrication, le régime BIYA écrase ce qu’il ne peut ni comprendre,  ni gérer…
La réalité de ce mouvement c’est qu’en l’absence de manifestations publiques, il apparaît compliqué pour le gouvernement camerounais d’aller chercher les enseignants dans les salles de classes pour leurs infliger divers supplices : cogner, écraser, emprisonner et tuer…

GRÈVE DES ENSEIGNANTS : LA STRATÉGIE DE DIVISION DU GOUVERNEMENT

Régler la situation des enseignants est manifestement moins urgente au Cameroun qu’acheter à prix d’or des grands crus classés des plus chers au monde, doter les administrateurs civils, bras séculiers de la dictature de véhicules automobiles 4×4 dits flambants neufs, ou financer des activités essentiellement festives et récréatives comme la CAN.

En débloquant 2,7 milliards de Francs CFA, une misère, pour payer des enseignants ayant participé aux notations de différents examens, le gouvernement BIYA espère ainsi réduire les rangs des grévistes en les privant du gros de l’effectif et le moins cher à désintéresser.

En effet, les primes dues aux enseignants correcteurs ne sont que des miettes à côté de ce qui est attendu par plusieurs milliers d’enseignants sans salaire, sans avancement, depuis plusieurs années voire plus d’une décennie.

La stratégie est donc simple, payer les primes aux plus nombreux afin de les amener à se désolidariser de la contestation et ainsi rendre inaudible les gémissements des milliers de contestataires résiduels sans salaires.

L’ÉCOLE C’EST-CE QUI DOIT RESTER QUAND ON A TOUT PERDU

En somme, sauver l’enseignement au Cameroun, c’est sauver ce qui doit nous rester quand on a tout perdu, c’est sauver le Cameroun. Ce n’est pas qu’aux enseignants de se mettre à genou pour réclamer leur dû. Le peuple camerounais dans son ensemble doit se mettre en branle, non seulement pour pousser le gouvernement à régler des questions financières essentielles de l’enseignement, mais aussi pour repenser le système éducatif à travers des ÉTATS GÉNÉRAUX DE L’ÉDUCATION.

L’enseignant au Cameroun ne peut et ne doit plus se contenter de former une jeunesse dont le rêve le plus précieux est d’échapper à cette atroce géhenne qu’est devenu ce pays. Il ne peut non plus continuer à se satisfaire de cette performance démentielle dans la médiocrité du produit de sa formation, qui a accouché du monstre qu’est le Cameroun d’aujourd’hui. L’enseignant plus que jamais doit être un être social, un être politique engagé : C’est le guide.

L’enseignant camerounais ne doit plus être celui qui baisse la tête.

Me Amedee Dimitri Touko Tom
Ancien Enseignant Vacataire de Droit

Related Posts