(texte)

Quand en 2015, j’ai inventé les produits “Made in Bafang”, en fustigeant le “Made in Cameroon”, pour beaucoup de Camerounais, c’était une marque de tribalisme.

Ce qu’ils ne pouvaient pas imaginer à l’époque, était que j’avais juste pris 10 ans d’avance sur ce que la Chine a décidé d’imposer aux entreprises ici.

On savait que la Chine était le pays le plus décentralisé du monde, mais on était loin d’imaginer que lors du dernier Canton fair, la compétition entre les villes et régions chinoises prendrait une allure de guerre mondiale.

Désormais, quand vous ouvrez une entreprise en Chine, vous êtes obligés d’incorporer dans le nom de votre entreprise en premier, le nom du village ou de la ville où votre usine a son siège.

En d’autres mots, si vous êtes Sony, et vous allez vous installer à Bafang, désormais, votre entreprise doit s’appeler Bafang Sony.

L’intérêt n’est plus de développer un pays, mais chaque village, chaque ville, chaque région. C’est cela le principe de prospérité partagée que nous appliquons déjà à Bafang depuis 10 ans.

Dans nos formations Rinvindaf, nous n’avons toujours insisté que vous ne nous servez pas si après votre passage à Bafang, vous ne rentrez pas démarrer dans votre village là première cellule embryonnaire de développement industriel.

Au Canton fair, la nouvelle compétition, n’est plus entre produits chinois et étrangers, mais entre les produits Made in Foshan et Made in Guangzhou.

J’ai retenu pour vous cette confrontation.

Il faut rappeler que Foshan serait dans le modèle occidental, la périphérie de Guangzhou.

Mais sans le modèle chinois, Non. Ce sont deux mairies souveraines qui doivent se livrer une compétition saine.

Au départ c’est Guangzhou, qui s’est développée la première. Foshan ne voulant pas devenir la périphérie de Guangzhou, s’est lancée dans une agressivité commerciale sans commune mesure.

Foshan est venu démarcher les entreprises installées a Guangzhou en leur promettant un an de loyer gratuit a toute usine que vous créez. Ensuite pour 10 ans, vous aurez un louez moitié de ce que vous payez maintenant que le territoire de Guangzhou.

Bien entendu, cette offensive a fait mouche. Beaucoup d’usines ont délocalisé de Guangzhou, pour à peine 10 km de distance pour Foshan.

Guangzhou a réagi, la mairie vient de sortir l’artillerie lourde pour riposter à Foshan.

Désormais, il y a toute une plateforme “Invest in Guangzhou is Investing in the future”, accompagnée de la Bank of Guangzhou qui vous donne un financement allant jusqu’à des millions de dollars, si vous investissez dans les domaines d’innovation technologique comme l’intelligence artificielle.

Guangzhou ne s’est pas arrêté en si bon chemin
. La mairie de Guangzhou vient de lever le niveau du combat économique, en inventant le Made in Baiyun.

L’étranger qui arrive en Chine ne va rien comprendre. Mais Baiyun est un quartier de Guangzhou.

Désormais ce sont les quartiers qui deviennent le coeur de la compétition. Comme par hasard Baiyun est aussi le nom de l’aéroport de Guangzhou. Le Made in Baiyun est une cité des usines des innovations technologiques.

La mairie de Foshan a réagi en créant une cité du luxe que nous avons eu le plaisir de visiter avec tout notre collectif et qui fera l’objet d’une prochaine leçon sur www.pougala.net

Quelle leçon pour l’Afrique ?

Cette compétition entre Foshan et Guangzhou a fait que la seule région du Guangdong à laquelle appartiennent Guangzhou, Foshan mais aussi Shenzhen, produit plus de richesses que tous les 54 pays africains réunis.

C’est la preuve que le modèle économique suivi depuis 65 ans en Afrique ne marche pas.

Ce n’est pas en concentrant toutes les usines à Douala et à Yaoundé qu’on va développer le Cameroun, mais en inventant, une compétition saine entre les usines à partir des villages qu’on va s’en sortir.

Le premier ministre camerounais a pouffé de rire lorsqu’en 2014, j’ai proposé exactement la même chose, en suggérant d’exonérer de TVA et d’impôts que les sociétés, les usines qui s’installent dans les villages camerounais, comme solution au problème d’exode rural et de développement déséquilibré du pays.

Aujourd’hui, les mairies rurales au Cameroun sont si pauvres qu’elles ne disposent pas de moyens, même pour ramasser les ordures.

Aujourd’hui, la Chine nous montre la voie. Les collectivités territoriales africaines, doivent être mises en capacité d’attirer les investisseurs nationaux, pour créer des emplois qualifiés dans nos villages.

Il faut convertir le tribalisme bête des frustrés, en un attachement conscient au développement de son village.

A rien ne nous sert de dire que vous êtes de Bamena ou Nguelemedouka si votre village croule dans la misère.

Il faudra inventer de nouvelles valeurs où les gens expriment la fierté de leur village non pas pour y avoir enterré des cadavres, mais pour y avoir installé une usine, ou toute activité lucrative.

La conséquence pour la Chine est que désormais, ce sont les pays voisins qui en profitent, parce que la compétition atteint un tel niveau que chaque entreprise pour résister au duel, doit délocaliser une partie de sa production au Vietnam, au Cambodge, en Thaïlande voisine.

Espérons que ce genre de publication va faire prendre conscience aux dirigeants africains, afin qu’ils comprennent l’utilité vitale de faire des villages africains, le pivot de leur développement industriel.

D’accord on n’a pas d’énergie dans nos villages, d’accord on n’a pas de personnels qualifiés dans nos villages, mais une incitation fiscale serait un bon signal politique pour aller dans le sens pris aujourd’hui par le gouvernement chinois et qui fait ses preuves.

Conclusion

Le modèle occidental de développement a montré ses limites en Afrique.

Il faut avoir le courage d’essayer autre chose. La capitale ou une deuxième ville ne suffisent pas pour produire suffisamment de richesses pour tout un pays.

On ne résout pas le problème du chômage massif des jeunes en Afrique en multipliant les motos-taxis qui polluent l’air qu’on respire, où en multipliant les formations pour former des chômeurs, mais en créant les opportunités d’emplois sur tout le territoire national, à commencer par les Villages en encourageant fiscalement les possesseurs d’épargne. Sans oublier le foncier garanti et gratuit destiné à créer la richesse pour la communauté.

C’est chaque territoire qui doit trouver les moyens pour attirer ceux qui ont leurs épargnes à investir et les rassurer qu’ils ne vont jamais perdre leurs mises en venant chez nous.

L’expérience chinoise nous dit que dans le nouveau monde en cours de construction, votre vrai village n’est pas celui où vous êtes né, mais celui où vous avez investi vos économies.

Dans cette logique, de quel village africains êtes-vous ?

Jean-Paul Pougala

Mardi le 20 mai 2025

Related Posts

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.