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L’histoire de Paul-Bernard Kemayou débute en 1938 à Bangou, dans les hautes terres de l’Ouest-Cameroun.

Fils du roi Sinkep Charles, il grandit dans un environnement où la tradition et l’honneur se heurtent déjà aux réalités de la tutelle coloniale française.

Brillant élève et passionné de football, le jeune prince développe très tôt un charisme naturel.

C’est durant ses années de formation qu’il noue une amitié déterminante avec Ernest Ouandié, futur leader de l’UPC, scellant ainsi son engagement futur dans la lutte pour la souveraineté.

À l’âge de 21 ans, il accède au trône et devient le douzième roi des Bangou.

Souverain moderniste et visionnaire, il est profondément respecté par son peuple qui voit en lui le souffle d’un renouveau pour la chefferie, malgré le poids de l’administration coloniale.

Officiellement, Kemayou joue le rôle d’auxiliaire de l’administration française.

Cependant, derrière ce costume protocolaire, il mène un combat clandestin, utilisant les moyens de sa fonction pour soutenir les nationalistes qu’il considère comme ses frères d’armes

Son audace le pousse à instaurer un véritable système de renseignement au sein de son palais

Il informe secrètement les résistants des mouvements de troupes françaises, sabotant ainsi les opérations de répression dans la région de l’Ouest.

La découverte de son double jeu en 1957 marque un tournant brutal.

Destitué par les autorités coloniales et condamné à mort par contumace, le roi se voit contraint d’abandonner son trône et son peuple pour sauver sa vie, entamant une errance périlleuse.

Son exil commence par une traversée héroïque de la forêt sacrée de Bangou pour atteindre le Cameroun britannique.

Soutenu par la solidarité de la communauté Bangou, il parvient à rejoindre Accra, où il trouve refuge auprès du père du panafricanisme, Kwame Nkrumah.

Toujours en quête de savoir pour servir la cause africaine, Kemayou s’envole ensuite pour la Chine.

Grâce à une bourse d’études, il y suit une formation en médecine, prouvant que sa lutte n’était pas seulement politique, mais aussi intellectuelle et humanitaire.

Il s’établit finalement en Guinée-Conakry sous la protection de Sékou Touré.

Tout en travaillant aux Archives nationales, il devient le représentant permanent de l’UPC, maintenant le flambeau de la résistance camerounaise depuis l’étranger.

Sa fin tragique survient le 17 octobre 1985 à l’hôpital Donka de Conakry, suite à un empoisonnement présumé après une rencontre avec une délégation camerounaise.

Aujourd’hui, sa mémoire appelle à une reconnaissance nationale, pour que ce roi résistant retrouve enfin sa place légitime dans l’histoire du Cameroun.

Nde’e Manfou’oo

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