Les activistes politiques camerounais se sont illustrés par des démarches de boycott envers des personnalités politiques, artistiques, traditionnelles, des personnalités publiques, des influenceurs… qu’ils accusent de complicité avec la dictature camerounaise au pouvoir depuis 40 années.

Cette démarche manifestement plébiscitée par une bonne frange de l’opinion, est incomprise par d’autres et apparaît comme injuste du point de vue de certaines victimes.

HURLER AVEC LES LOUPS QUI ONT PRIS EN OTAGE LE CAMEROUN

Dire que la situation sociopolitique au Cameroun est apocalyptique serait un euphémisme. Ce pays jadis prospère est la forme la plus aboutie d’une mixture d’un totalitarisme qui se veut doux et d’une dictature barbare. Chaque interface se révélant selon les circonstances.

Il est également un condensé non seulement d’une inégalable faillite d’une politique économique de prédation et de prévarication d’état, mais aussi d’une faillite des élites incapables par leur démarche de penser le monde au-delà de leurs intérêts de survie. C’est cette catégorie de personnes que j’ai souvent qualifié de SURVIVANTS.

Cette élite est donc perçue comme étant en démission devant l’intérêt collectif, duquel ils tirent cependant leur rayonnement et leur légitimité. En réalité, les politiques, les artistes, les chefs traditionnels, les sportifs, les intellectuels… n’ont du sens qu’au service du collectif.

La BAS considère donc que ces élites-là ne servent plus que ses intérêts ou ceux au nom desquels elles se sont prostituées. De ce fait, les soi-disant élites sont considérées comme nocives, manipulatrices, maltraitantes pour le collectif.

En effet, après 40 années d’une dictature impitoyable, le peuple sait définitivement qu’il ne peut plus rien attendre du pouvoir politique. Toutefois, il pensait au moins pouvoir compter sur « l’élite », dont font partie ces diverses catégories, pour porter sa voix. Mais il découvre désabusé, qu’il est otage d’une élite de noceurs et jouisseurs impénitents, malfaisante, mal intentionnée, tortionnaire psychologique sans scrupules, pour qui un mensonge réussi vaut une vérité. En un mot, une élite sans VALEURS, qui vend désormais au monde, le modèle de la prostitution physique, morale et intellectuelle.

On voit donc se profiler la reproduction d’un système par transmission génétique, par mimétisme : une société désagrégée, des antivaleurs, ou des valeurs inversées…

LA BAS C’EST CETTE JEUNESSE A LAQUELLE LES DIRIGEANTS CAMEROUNAIS N’OFFRENT PLUS POUR SEUL RÊVE QUE L’EXIL

Les dictatures, pour durer, ont élaboré et développé une véritable intelligence de la conservation du pouvoir, qui par la brutalité, la ruse, la fraude, la corruption, neutralisent toutes les formes d’expressions des libertés et d’alternance politique.

Les enfants du Cameroun, qui sont partis de ce pays, devenu une véritable géhenne de laquelle sa jeunesse ne rêve plus que de se sauver, découvrent le monde dans lequel ils vivent désormais. En même temps, ils font l’expérience d’une société des libertés et des droits de l’homme, d’une société dans laquelle l’homme et l’intérêt général gouvernent toutes les politiques.

Parallèlement, ils prennent conscience de l’abîme qui sépare le monde de leurs origines à la société qui les accueille désormais. Ils rêvent de voir leur pays, le Cameroun, ressembler à toutes ces grandes Nations de la terre. Ils rêvent d’un Cameroun différent, où l’on ne se contente pas de naître, vivre, et mourir dans la dictature et la pauvreté. Ils entrent donc en rébellion intellectuelle, contre un système qui les a contraints à l’exil, leur raison de vivre est désormais de le faire changer…

LA BAS AMBITIONNE DE CRÉER UN ÉLECTROCHOC ET UNE PRISE DE CONSCIENCE COLLECTIVE

La dictature camerounaise ne manque pas d’imagination quant à sa capacité à réprimer l’expression des libertés. Les enfants du Cameroun qui ambitionnent de donner une réponse activiste pertinente à la dictature ainsi qu’à ces complices et comparses, inventent ou adoptent des formes « nouvelles » de protestation et d’expression politique : « Si on ne peut s’adresser directement au père, on passe par le fils… ».

La BAS rêve de susciter au sein de l’élite du peuple, adepte de la religion du pervers narcissisme, une forme de solidarité et de culpabilité collective, qui forge sa capacité d’indignation. La culpabilité ici étant ce système qui nous permet de prendre conscience des valeurs qui structurent les sociétés humaines.

La BAS pense que l’élite, dont font partie, les artistes, les intellectuels, les sportifs, les politiques, les autorités, traditionnelles et religieuses, les leaders d’opinion et influenceurs… doit porter des valeurs d’empathie, de solidarité et que par ces derniers, ces valeurs vont à nouveau irradier dans l’ensemble cette société camerounaise, pervertie par une politique criminelle.

Une politique qui a accouché d’un système qui leur semble être bon d’autan qu’il leur a donné l’avantage d’être ou se hisser dans des positions dominantes. De facto, ils deviennent malgré eux des entrepreneurs de ce monde de la jungle, de ce monde dangereux, dans lequel des salopards, des cyniques et des pervers trouvent leurs comptes…

La BAS par ses actions interpelle également les conformes, ceux-là même qui ont leur plateau d’œufs sur la tête et ont peur de la bagarre, ces véritables survivants qui n’ont le courage que de respirer et qui pensent que les bruits de l’engagement social et politique peuvent ébranler ou fragiliser leur démarche de survie.

VERS LA FIN DES FORMES DE PROTESTATIONS PACIFIQUES

L’actualité brûlante des luttes sociales dans le monde, présente des formes de protestations de plus en plus violentes. Leur brutalité contraint souvent à l’action des dirigeants endurcis par un idéologisme forcené, parfois retranchés, sous le bouclier du « suffrage universel ».

En même temps, l’on observe un déclin des formes de luttes pacifiques, désormais étiquetées comme folkloriques, stériles, inefficaces…

C’est dans ce contexte que se déploie la BAS, qui entend faire avancer des causes sociales, économiques et politiques dans un environnement camerounais de la fin des temps, un monde dans lequel l’expression politique est verrouillée voire criminalisée…

À l’instar des FAUCHEURS VOLONTAIRES, qui sévissaient dans des champs, détruisant les cultures d’OGM, à l’instar des militants du mouvement écologiste Extinction Rebellion (XR), qui ont occupé et privé d’accès en voiture, un des principaux ponts et place du centre de Paris, et sa prestigieuse rue de Rivoli, pendant de nombreuses semaines, à l’instar du mouvement DERNIÈRE RÉNOVATION ou des GILETS JAUNES, qui ces dernières années ont réussi, en utilisant des moyens qui flirtent avec les frontières de la légalité, à faire entendre les causes qu’ils défendent, la BAS pense qu’être gentil ne fonctionne plus dans l’activisme.

Pour attirer l’attention sur une cause, il faut forcer les égards et les regards. Par tous les moyens… L’activiste réfléchit davantage sur ce qui pourra choquer les médias, choquer les politiques, faire parler l’opinion… Et dans cet ordre d’idées, la stratégie de la perturbation est la plus utilisée. Parlant de sa démarche, l’un des plus influents activistes européens, Jose BOVE disait : « on parle de combats non violents et non de béni oui-oui avec de petits oiseaux ».

Désormais, les militants activistes ambitionnent d’aller encore plus loin, en énonçant même un fondement juridique de certains aspects de leurs démarches, qui pourraient être qualifiés d’illégales : « il est légitime de violer la loi pour mettre un terme à un danger imminent ou une injustice qui tue ».

En somme, nombreux sont ceux qui n’apprécient la démarche de la BAS qu’avec des yeux d’un peuple qui ne connaît pas la saveur des libertés politiques. Ils en viennent même à oublier que ces activistes s’expriment essentiellement dans des pays qui ont les moyens du droit et de la sécurité des populations. De ce point de vue, la puissance de leurs actions est de loin inférieure à ce qui est toléré chez certains mouvements activistes, parce que jugé comme procédant simplement de l’expression des libertés.

Toutefois, il arrive que dans ce jeu, qui flirte avec les frontières de l’illégalité, l’activiste se trompe. Courageusement, il en assume les conséquences légales et judiciaires. C’est ici que s’exprime d’ailleurs la dimension héroïque et sacrificielle de son engagement, que l’on essaye de ne comprendre que par rapport à nous-même et par rapport aux intérêts que nous défendons.

Maître Amedee Dimitri Touko Tom

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