(édito de Michel Lobe)

Dans les autocraties, il n’est pas aisé de concourir contre le pouvoir en place depuis des décennies. La tâche est encore plus ardue quand le président en exercice se représente pour la énième fois. Dans le cas du Cameroun, Paul Biya est tenté de briguer un nouveau mandat, même si son âge serait un handicap, voire une utopie dans les nations policées.
L’opposition politique au Cameroun est un maillon d’une chaîne que le pouvoir en place, tel un chapelet, gère à sa guise. Cette opposition a été systémiquement affamée et méprisée. Bien malin qui nous dira celle ou celui qui émergera de cette jungle où le pouvoir RDPC manie le bâton et la carotte.
La liste des prétendants de l’opposition politique à la magistrature suprême est longue. Ceux qui affichent leurs ambitions sont aussitôt discriminés et jetés à la vindicte populaire par le pouvoir tout-puissant en place. Mais risquons-nous à citer pêle-mêle des noms familiers : Akéré Muna, Cabral Libii, Joshua Osi,Maurice Kamto, Tomaïno Ndam Njoya. etc.
D’autres candidats vont s’ajouter à cette liste. Mais ne soyons pas dupe. Le candidat qui émerge de cette liste est Maurice Kamto. Fort de sa légitimité, il lui sera difficile de convaincre ses pairs à se rallier à lui dès le premier tour. En effet, les coups durs qui seront portés à Maurice Kamto ne viendront pas seulement du RDPC. Ils seront l’œuvre des autres candidats et leaders de l’opposition qui se tromperont volontairement d’adversaire.
Cependant, l’élection à la présidence de la république au Cameroun en 2025 reste une énigme. Malgré les difficultés de ralliement au premier tour, Maurice Kamto devrait composer avec tous les opposants, y compris les putatifs qui se trouveront là pour le discréditer. Une autre composante devrait rallier l’opposition : la mobilisation des électeurs lassés par des années de promesses non tenues qui ont vu le pays plonger dans l’incertitude.
La disparition de John Fru Ndi laisse le SDF orphelin. Ce dernier n’est plus que l’ombre de lui-même.
Mais il traine encore une horde de sympathisants nostalgiques qui ont un rôle à jouer pour les prochaines échéances présidentielles. Et que dire des illustres prisonniers politiques qui croupissent dans les geôles humides et infestées de moustiques ?
Une autre voix peut apporter un souffle nouveau à l’opposition camerounaise. C’est celle du jeune Cabral Libii. Il a de la verve et maîtrise bien les problématiques qui minent le Cameroun. Il aura à gagner à se rapprocher du MRC et de son chef emblématique, Maurice Kamto.
Cependant, le pouvoir RDPC n’est pas disposé à jouer la carte de la jeunesse ou d’un nouvel homme. Il dispose de nombreuses cartes entre ses mains. Pour semer le trouble, il peut parrainer de nombreux putatifs comme à son habitude. D’autre part, il peut à tout moment exclure certains candidats du champ de la légitimité politique.
Les élections présidentielles de 2025 au Cameroun restent une grande énigme. Mais ne nous voilons pas la face. Paul Biya n’est pas disposé à passer le témoin. Dans ce contexte, l’opposition, ou ce qu’il en est,doit créer un large mouvement dans tout le septentrion. Une campagne de cette envergure mobilise des femmes, des hommes, de l’argent, beaucoup d’argent.
Le pouvoir n’a pas usé le RDPC. Mais il est dans une zone de turbulence où son bilan économique, social et financier ne plaide pas en sa faveur. Le développement tant attendu n’a jamais eu lieu. Les caciques du pouvoir sont à court d’arguments car le pays sombre depuis des décennies et la population est tétanisée.
Le tribalisme décrié, la corruption et maintenant la dégradation des mœurs ont créé un climat que rien ne saurait recommander.
L’opposition aura du pain sur la planche. Mais elle doit arrêter de se déchirer. Seul un climat de sérénité apportera le changement tant attendu, tant espéré. Elle doit présenter un projet qui prend en compte les différentes composantes de la population où le tribalisme, l’incompétence, l’incurie, l’injustice et l’inertie ont créé un fossé entre les différentes couches sociales.

Le changement est possible. Il doit prendre racine dans un élan de sursaut où la réconciliation permettra à toutes les composantes de l’électorat de s’exprimer enfin librement. L’opposition unie peut réaliser ce rêve, celui d’une politique nouvelle qui offrira à chaque camerounais le succès par le mérite.
Le pouvoir RDPC n’a pas su le faire, brisant les rêves d’un Cameroun uni autour de tous ses enfants. Le chantier de l’opposition est colossal, voire titanesque. C’est un socle avec ses différentes composantes et un même but pour écrire un nouveau chapitre de l’histoire d’un jeune pays.

Michel Lobé Etamé
Journaliste indépendant

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