La guerre en Ukraine est très éloignée des frontières africaines. Elle peut se poursuivre sans affecter ce continent embourbé dans ses problèmes de mal gouvernance où l’Occident veille et dicte sa loi. Cependant, l’Afrique se retrouve au centre des préoccupations d’une guerre lointaine et subitement proche alors que l’insécurité s’accroit dans le Sahel.

Avant que cette guerre n’éclate, combien d’Africains connaissaient l’Ukraine ? Pas grand monde. Subitement, nous découvrons que ce territoire, illustre inconnu, nourrit toute l’Afrique avec ses immenses champs de blé. « Le pain quotidien » vient d’Ukraine et nous l’évoquons quotidiennement dans nos prières. Comme le monde est petit !

Voilà l’Afrique engagée, malgré elle, dans une guerre dont l’issue est incertaine. Et que prédit-on à l’Afrique si elle ne s’engage pas aux côtés des ukrainiens ? Le continent va traverser une longue période de famine. Le spectre des années sombres en Ethiopie, au Soudan ou en Somalie revient. La mort programmée des enfants, des femmes, des hommes et des bêtes refait surface.

Un chantage éhonté

Les votes à l’ONU se suivent. D’un côté, il y a l’Occident, de l’autre, il y a la Russie. A l’ombre, ou plutôt en embuscade, il y la Chine et l’Inde. Cette guerre va s’internationaliser. Il faudra bien que les nations dites libres obligent les « suiveurs » à s’engager ouvertement à leurs côtés et à apporter leur caution à l’Ukraine. En d’autres termes, si l’Afrique veut du blé, elle doit choisir l’Ukraine. La messe est dite.

Dans un discours, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a clairement demandé à l’Afrique de choisir son camp. Pour lui, l’Afrique est otage de la Russie. Sur quoi se base-t-il pour disqualifier l’Afrique ? C’est une injonction digne des puissances colonisatrices. Pour lui, il y a deux camps : celui de la liberté et celui de la dictature.

Cette « union de raison » sortirait l’Afrique du chaos permanent entretenu. L’Afrique a fourni par le passé un des plus grands contingents militaires à la France et à l’Europe pour combattre le nazisme. Aujourd’hui, elle doit à nouveau se ranger derrière les « forces de la liberté » qui ne lui reconnaissent toujours pas le droit d’exister.

L’injonction du président ukrainien est tout simplement immonde. Ce chantage est insupportable. Il devient une condition pour fournir du blé à l’Afrique. Et pourquoi l’Afrique cèderait-elle à ce chantage ?

Face à la pénurie alimentaire annoncée, l’Afrique est confrontée au djihadisme et à une campagne de déstabilisation des régimes « rebelles ». Adieu Bob Denard, champion des coups d’Etats en Afrique. La Françafrique a un nouveau modus operandi. Elle finance le terrorisme au Sahel. Comme les résultats se font attendre, elle sous-traite les coups d’Etat par ses alliés en Afrique de l’Ouest. Alassane Ouattara est devenu le nouveau Bob Denard. Il fait le « sale boulot » sans état d’âme. Voilà un enfant de l’Afrique qui a choisi de servir ses maitres et à trahir nos idéaux de liberté. Il entretient un climat de terreur en Afrique pour justifier la présence des bases militaires occidentales sur le continent.
La guerre en Ukraine est certes lointaine. Mais elle nous rattrape et vient nous rappeler que la mondialisation n’est que le fruit d’une injustice conceptualisée pour écraser les plus faibles, quel que soit leur camp.

L’Afrique n’a pas à choisir de camp. Elle doit militer pour sa souveraineté. Pour cela, elle a besoin d’unité. Et cette unité passe par une concertation entre ses différents Etats pour enfin donner une crédibilité à l’Union Africaine et pour parler d’une même voix.

Par Michel Lobé Étamé
Journaliste Indépendant

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